Une douce musique me sort de ce sommeil profond qui m’enveloppait.
Je suis encore sur le torse doux d'Idriss. Je reste dans l'incertitude quelques
secondes et les ronflements d'Alma me sortent de cette douce rêverie. J'ouvre
les yeux et j’aperçois deux espèces de loques humaines, bave aux coins de la
bouche, à ma gauche et ma droite.
Je saute sur mon téléphone avant qu'il
sonne une nouvelle fois et réveiller les filles.
Il est 6h et je n'ai pas de message
d'Idriss, un peu triste mais je me plonge dans mes pensées et ce qui reste des
images de mon rêve.
Je m’extirpe avec difficultés de mon
énorme lit King Size sans réveiller les filles.
Je pose enfin un pied-à-terre, j’aperçois
Lesha. Il doit avoir faim, en même temps un maine coon ça mange beaucoup.
Il est tout mignon, tigré marron et noir.
Nous l'avons également payé à trois, un chaton à mille euros c'est un
investissement. Je le prends dans la main ou plutôt sur le bras, et je me
dirige vers la cuisine. M'assurant de ne pas faire de bruit. Je fais chauffer
la machine à café, attends que l'eau soit prête et je prends la capsule du café
le plus fort. J'ai une de ces barres sur le front !
Une fois dans le salon je me rappelle
d'hier, et vois les cadavres à terre de vodka, rhum, cachaça, curaçao... Et
comprend vite d'où vient mon mal de tête.
Première gorgée de café, ça fait du bien
par où ça passe.
J'entends des bruissements de draps, je me
demande si c'est Alma ou Maddie qui se lèvera en première. Et j'aperçois Alma,
tituber je lui propose un café elle m'offre pour seule réponse un grognement
que je prends pour un oui. J’en profite pour mettre le ballon en marche forcée.
Trois filles avec de longs cheveux ça consomme de l'eau et je n’en ai pas
beaucoup.
Quelques minutes après Maddie nous
rejoignent. Fidèle à elle-même elle a la pêche et commence à déverser des flots
de mots plus aigus les uns que les autres.
Je lui hurle gentiment de la fermer.
Une heure plus tard nous sommes trois dans
la salle de bain à essayer de se maquiller dans mon minuscule miroir.
Malgré la douche et le café j'ai encore la
tête dans les nuages.
Nous descendons chacune à nos voitures, on
se dit à ce soir, elles seront là elles ont le double des clefs.
Dans ma voiture je lance The Weeknd - I can't fell my face. Cette musique
me fait beaucoup de bien. J'adore le rythme et je danse en conduisant. Je pense
aux hommes toujours embrumée et me rappelle de Manu un jeune homme que j'ai
rencontré dans un bar. Il était très beau, brun, grand, tout ce que j'aime.
Mais malheureusement je n'ai pas réussi à aller plus loin avec lui. Quelque
chose qui me bloque. Je ne sais pas quoi mais je n'arrive pas à me projeter
avec un homme. Je me sens bien et je sens qu'il me manque un homme mais je ne
veux pas qu'il entre dans ma vie. Je ne me vois pas laisser la place à un
homme. En tout cas il embrassait bien. Cette pensée me fait sourire, et me
voilà arrivée au travail. Ma collègue et amie Alex sera en retard. Elle prend
les transports, et moi je stresse parce que je sais qu'aujourd'hui nous avons
meeting de quatre heures sur la nouvelle stratégie de la boîte et qu'Idriss
sera là. Nous devons présenter nos premières conclusions ensemble. On ne s'est
pas revu depuis. Et nous devons faire un brainstorming pour que nos conclusions
soient raccords.
J’aperçois mon bureau au milieu de l'open
espace. Étrangement c'est le seul qui est plein de couleurs. Je suis de nature
joviale, tous mes collègues m’apprécient, il y en a un qui m'a fait un dessin
ou je suis en Athéna déesse de la guerre avec notre plus gros client à mes
pieds. J'adore ce dessin et j'aime beaucoup ce collègue, je pensais qu'il en
pinçait pour moi, jusqu'au jour où je l'ai surpris aux archives avec le
standardiste.
J'allume mon ordinateur, et découvre une
bonne centaine de mails, je soupire. Et pense que dans moins de 30 minutes je
vais me retrouver seule en face à face avec Idriss dans une pièce fermée le
tout pendant une heure. Et présenter les conclusions de l'audit ensemble.
Je ne fais que penser à lui nu, sur moi,
moi sur lui, sa bouche contre la mienne, son corps glissant sur le mien.
Une main se pose sur mon épaule et je
sursaute immédiatement. Je reconnais une odeur vanillée, mélangé à un musc
puissant et des notes boisées. C'est Idriss.
J'hésite à me retourner et me retrouver
nez à nez face à lui. Comment va-t-il me regarder ? Va-t-il me regarder avec
les mêmes yeux amoureux et pleins d'envie ?
Dans un incroyable élan de bravoure je me
retourne le sourire aux lèvres.
J’aperçois en premier les contours de son
menton carré, où traine une petite barbe de trois jours. Je détaille ses lèvres
épaisses, gonflées, et terriblement douce. Je me perds sur leurs couleurs
rosées, j'aimerais tellement y apposer un baiser léger. Je remonte jusqu’à ses
yeux, marron, doux, ses cils étoffés et longs. Ce même regard qu'il a posé sur
moi une fois que nous avions fait l'amour.
Sa peau légèrement ambrée, un sourire se
dessine sur ses lèvres et créer des petites ridules aux coins de ses yeux. Il
est très beau, mais je ne suis toujours pas calme, toujours tendue.
Il retire sa main :
- Tu vas bien ? J'ai réservé une salle de
réu pour le brainstorm. J’espère que tu n'as pas oublié que l'on présente les
conclusions de l'audit aujourd’hui.
Je mets quelques secondes avant de
réaliser qu'il est bien réel, que je vis bien cette situation gênante, qu'il
semble mieux gérer que moi.
- Non je n'ai pas oublié, mais je n'ai pas
encore sorti mes notes. Je bégaie et je me sens rougir. Tu peux attendre
dix minutes.
- À non je n'ai pas le temps ! Prends ton
ordinateur on fera comme ça. Tu referas ton speech lorsqu'on aura terminé.
J'avais oublié à quel point il était
autoritaire au travail. Tout le contraire de l'homme doux prévenant qu'il est
dans l'intimité.
Je débranche mon ordinateur, et me lève.
- Très bien allons-y !
Je le suis, et traverse le bureau, sur mes
talons de 15 cm j'ai l'impression que c'est un parcours du combattant. Je le
vois devant moi, et c'est un spectacle. Sa chemise saillante détaille tous les
muscles de son dos, de ses épaules et de ses bras. Je le revois sans chemise,
je sais ce qui se cache le dessous, sa toison, la douceur de sa peau, le gout
de sa peau... Un frisson parcourt ma colonne et me fait trébucher sur la
moquette. Je tombe sur lui, il ne comprend pas et n'essaie pas de me rattraper.
Il s'écarte simplement. Je me relève sans son aide. Il me regarde dubitatif,
comme si j'étais la plus grande gourdasse du monde.
Quand j'y pense quel goujat ! Il ne m'aide
même pas à me relever. Mais il est à mille lieux de ce qu'il était samedi
dernier.
C'est devenu super connard.
Nous arrivons à cette fameuse salle de
réunion. Elle est minuscule ! Une pauvre table ronde au milieu d'une salle de 5
m² avec trois chaises. Pas une seule fenêtre, des néons qui bruisse, la table
et est petite et grise.
Rien n'est joyeux, propice à la bonne
humeur.
Je prends place sur une chaise, il referme
la porte et son visage s'illumine. Il tire également les rideaux. La pièce est
étonnamment insonorisée, il verrouille la porte, et me regarde avec un sourire
maléfique :
- je veux être sûre que l'on ne soit pas
dérangé.
Je comprends la double intention mais il
n'en sera rien. Je me lève m'approche de lui, courageuse je lui dis :
- et si j'ai envie d'aller aux toilettes !
Je me penche vers lui, passe le bras
derrière son dos. Ma poitrine frôle son épaule, et je déverrouille la porte.
Je me redresse, et son bras s'enroule au
creux de mes reins.
Je m'écarte avec fureur. Lui jette un
regard mélangé de stupeur et de colère.
- Qu'est-ce que j'ai fait ?
- Quoi !
- Mais je ne comprends pas ! Je pensais
que l'on était d'accord.
- D'accord pour baiser dans la salle de
réunion que tu à réserver pour que l'on travaille notre présentation devant
tous les boss ! Mais tu es fou ! En plus je tombe et tu ne m’as même pas aidé à
me relever ! Tu sais quoi je ne parle plus avec toi tu es un idiot non !
Tu es un gros connard ! Le plus gros de toute la terre !
Je tourne les talons et claque la porte lourdement.
Je regagne mon bureau et Alex me voit furieuse
:
- qu'est-ce qui se passe ?
- Idriss m'a tendu un piège.
- Il a quoi.
- Il m'a emmené dans une salle de réu où
il comptait coucher avec moi.
- Quoi ! Mais quel salop ! Je n'aurais
jamais imaginé ça de lui ! Faut le dénoncer à la direction !
- bien sûr comme ça je serais virée ! Je
te rappelais que les relations intimes et sentimentales sont interdites ici !
- Merde c'est vrai ! Ba chérie heu...
Gifle-le !
- Haha ! Si seulement j'avais pu je
l'aurais giflé.
Je retourne m'assoir et ouvre mon
ordinateur.
Je vois un mail d'Idriss :
"je suis désolé mais je ne voulais
pas te vexer. On a cette présentation et j'aimerais que l'on bosse. Excuse-moi
! Reviens-je ne voulais pas faire ça. Je t'en prie ne me vois pas comme un
salop.
Je t’attends.
Bisous "